Article de Simon Boivin. Le Soleil.
Reproduit avec autorisation au moment de la publication.
Le Complexe de soccer Honco de Lévis ne touchera pas un sou des 3,6 millions $ de la subvention demandée au gouvernement du Québec. Dur coup pour l’installation, qui sera inaugurée officiellement aujourd’hui, et pour les joueurs à qui la facture est refilée.
L’édifice de 7 millions $ se dresse bel et bien sur les terrains de l’école secondaire Les Etchemins. Mais les cinq promoteurs derrière ce partenariat public-privé (PPP) sans but lucratif ont appris début octobre que le ministère de l’éducation, du Loisir et du Sport (MESL) ne sera pas de la partie.
« Ils ont commencé la construction avant que le ministère ne termine l’analyse du dossier, explique Jean-Pascal Bernier, attaché de presse de la ministre Michelle Courchesne. à partir de là, c’est sûr que le ministère ne pouvait plus financer ce projet-là. Les règles sont claires. On ne finance pas un projet en cours de réalisation. »
Les promoteurs plaident que les règles ont changé en cours de route. « Pour nous, le projet était conforme en tous points aux critères exigés au moment où on a déposé la demande, explique Alain Blanchet, directeur de cabinet de la mairesse de Lévis, Danielle Roy-Marinelli. La probabilité que ça fonctionne était grande. Ils ont ajouté un critère qui était l’obligation de tenir un appel d’offres. »
Sans appel d’offres
La Ville de Lévis, la commission scolaire des Navigateurs, la caisse Desjardins des Affluents, l’Association régionale de soccer Québec et l’entreprise Honco se sont associées pour former la Corporation du complexe de soccer Honco de Lévis. Honco, une entreprise de Saint-Nicolas qui construit des structures d’acier, a bâti le complexe. Sans appel d’offres.« Au départ, cette restriction n’existait pas, indique Réal L’Heureux, président du complexe. Et, de toute façon, Honco est la seule entreprise qui pouvait fournir une structure comme la nôtre. »
Sur le site du ministère, dans la description du programme, cette « restriction » n’est toujours pas inscrite. Sauf qu’elle fait implicitement partie des exigences, explique M. Bernier, du cabinet de la ministre. « C’est la norme générale du gouvernement, ça doit nécessairement se faire par appel d’offres », indique-t-il. L’absence de précision sur le site Internet est probablement un oubli qu’il faudra corriger, poursuit-il.
La demande de subvention a été faite le 6 février. En mars, Lévis a obtenu du ministère des Affaires municipales la permission d’endosser un prêt de 2,5 millions $ pour ce projet. En avril, la commission scolaire a été autorisée à céder un morceau de ses terrains pour que le complexe puisse s’y construire. Deux signaux positifs pour les promoteurs, qui ont fait connaître leur intention de commencer les travaux en avril.
Ce n’est qu’il y a trois semaines que les partenaires ont reçu une lettre, datée du 14 août, leur signifiant le refus du MELS.
« Ça n’a aucun bon sens, plaide le député adéquiste de Lévis, Christian Lévesque. Le gouvernement reconnaît que c’est un projet important, puis tout s’arrête. On s’est aperçu entre-temps qu’il avait changé ses règles sans même aviser le promoteur. (…) à cause des élections, on dirait que des choses ont changé dans ce dossier-là et qu’on a préféré développer Québec plutôt que Lévis. »
Moins parfait que prévu
Le Complexe de soccer Honco, de la famille des PPP que le gouvernement promeut et que certains candidats à la mairie de Québec citent en exemple, s’avère moins parfait que prévu. « Le message qui nous apparaît clair du gouvernement, c’est que si tu es en mode PPP, tu n’auras pas de subvention », lance Réal L’Heureux, président du complexe.Il ne croit pas avoir « joué avec le feu » en procédant aux travaux avant la confirmation du ministère. « Si on avait eu une réponse au printemps, on aurait été correct pour les délais, dit-il. Il y avait une urgence d’avoir un stade de soccer dans la région en 2007. »
L’heure est maintenant à l’entreprise de persuasion. « C’est évident que 3,6 millions $ sur un total de 7 millions $, c’est très important, convient-il. On est à l’étape de demander une révision de la décision du ministère. »
Mais, pour le moment, rien ne semble remis en cause du côté gouvernemental. « C’est vraiment hors norme, affirme Jean-Pascal Bernier, du MESL. Le programme ne peut pas couvrir ce projet-là. »
Ce matin, les cinq partenaires du projet procèdent à l’inauguration officielle du Complexe de soccer Honco de Lévis. Leurs invitations à la ministre de l’éducation, Michelle Courchesne, et à son collègue responsable de la région de Chaudière-Appalaches, Laurent Lessard, sont restées sans réponse.
La facture refilée aux joueurs
Les promoteurs du Complexe de soccer Honco craignent de se faire chiper des joueurs par les futurs stades de la Rive-Nord.Sans la participation du gouvernement du Québec, le stade de soccer intérieur de Lévis devra louer ses terrains au tarif horaire de 135 $, au lieu de 90 $.
« Pour un joueur qui passe du soccer en gymnase à des terrains comme le nôtre, ça fait une différence de 200 $ de plus pour la session hivernale de 20 semaines, explique le président du complexe de soccer, Réal L’Heureux. Cela serait réduit de 100 $ à 120 $ avec la subvention. »
Dès cet hiver, quelque 20 000 mordus du ballon rond se disputeront les plages horaires du complexe lévisien, le seul à offrir des terrains intérieurs dans la région.
Mais le campus Notre-Dame-de-Foy, qui a un projet de stade couvert de 10,4 millions $ subventionné à 50 % par Québec, doit ouvrir ses portes à la fin de 2008. Le projet de 19 millions $ du parc Chauveau financé au deux tiers par les gouvernements fédéral et provincial doit être ouvert au public au printemps 2009. Sans compter les terrains de soccer-football du Super PEPS.
« C’est évident que si eux offrent des terrains à 80 $ ou 90 $ de l’heure, il y a le potentiel de venir chercher notre clientèle », note M. L’Heureux.
Volonté d’être les premiers
La volonté des partenaires du complexe Honco d’être les premiers à répondre au besoin criant d’installations intérieures n’est pas étrangère à leur empressement à construire la bâtisse. « L’idée était aussi de fidéliser une clientèle et de penser comme une entreprise qui est dans un marché et qui veut des clients », souligne Alain Blanchette, au cabinet de la mairesse de Lévis.Les plateaux de jeu du complexe sont déjà réservés à 85 % cette année, note M. Blanchette. « Mais dans cinq ans, ce sera une autre game, prévoit-il. Et il y aura une forme de compétition. Pourquoi notre centre, qui a été réalisé avec le jus de bras de tout le monde et en se serrant les coudes, devrait coûter le double des autres qui auront été subventionnés? »
Une situation qui préoccupe aussi le député adéquiste de Lévis, Christian Lévesque. « à Québec, ça va coûter 90 $ pour des stades subventionnés, affirme-t-il. Là, on dirait que parce que les gens de Lévis sont trop dynamiques au goût du gouvernement, ils n’ont pas accepté de financer le projet. »
Tout ça aux frais des enfants. Amenez-en des projets. À bien y penser, quand on voit d’où provient les fonds pour le Centre des congrès (fonds sur l’infrastructure municipale rurale), on se rend compte que Lévis ne ramasse pas sa part. On trouve un peu d’argent dans un fond de tiroir pour le centre des congrès et puis plus rien pour le reste. Pourtant, il y avait des ententes à différents paliers gouvernementaux pour la réalisation du projet. Est-ce le prix à payer afin d’avoir des équipements modestes pour nos jeunes ? En passant, le gouvernement va aider la financière agricole qui a a perdu de l’argent en investissant dans des placements à risque, est-ce que des têtes vont tomber dans ce dossier-là ? La SAAQ n’a t’elle pas connu aussi de tels déboires ? On devrait changer le nom du stage Honco pour le stade Honto (honte aux) gouvernements.