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Lors de la création du Canadien National en 1923, le gouvernement fédéral lui confie la responsabilité de l’entretien et de la gestion du pont de Québec. Dès lors, un programme d’entretien est établi et chaque année du mois de mai jusqu’au mois de septembre, une équipe d’hommes travaille alors à réparer et repeindre environ un cinquième de la surface du pont. La peinture orange que l’on applique en guise de protection contre la rouille et que l’on peut apercevoir chaque été sur une partie du pont est un indicateur que le pont se refait une beauté partielle. Avec les années et surtout avec la réduction des budgets consacrés à cette fin, les politiques d’entretien minimal du Canadien National commencent à se traduire par un envahissement accéléré de la rouille, et petit à petit, cette dernière se fait de plus en plus visible.
En mai 1987, lors de la cérémonie reconnaissant le pont de Québec comme un monument historique international du génie civil, on a commencé à s’inquiéter collectivement face à la détérioration de la structure et au piètre aspect visuel de ce joyau international. Des articles de journaux en font d’ailleurs largement État.
Vers la fin de l’année 1987, une quinzaine de personnes profondément préoccupées par le manque d’entretien du pont de Québec et qui ne souhaite pas qu’il soit abandonné au ravage du temps et de la corrosion, se réunissent au département de génie civil de l’université Laval, afin de discuter de moyens à prendre pour le sauver1.
Toujours en 1987, le ministère fédéral des Transports est toujours propriétaire du pont, même s’il a confié depuis 1923 le mandat de sa gestion et de son entretien au CN. On se rappelle qu’en 1928, le gouvernement fédéral a conclu une première entente avec le gouvernement du Québec concernant la voie carrossable. En 1949, lors des travaux d’élargissement de cette même voie carrossable, une seconde entente est signée avec le gouvernement de Maurice Duplessis pour une location à long terme, c’est-à-dire pour trois périodes successives de 21 ans chacune. Pendant ces 63 années, c’est-à-dire jusqu’en 2012, le gouvernement du Québec est tenu de verser la somme de 25 000 $ par année au gouvernement fédéral comme contribution pour l’entretien du pont. Par ailleurs, le gouvernement provincial demeure responsable de l’entretien de la chaussée, de son infrastructure ainsi que du passage piétonnier2.
En 1987, lors de la formation du comité de sauvegarde du pont, le transport ferroviaire du CN représente à peine 10 % du tonnage qui transite sur le pont. Les trains de VIA Rail, les camions, les autobus et les automobiles constituent donc l’autre 90 %. On constate également que la corrosion du pont est en grande partie causée par le sel, que les véhicules transportent avec eux lors de leur passage sur le pont. Une étude effectuée à l’époque démontre que les travaux d’entretien de la structure principale nécessiteraient des investissements annuels approximatifs de 2 800 000 $ alors que le budget consenti n’est que d’environ que le quart de cette somme. Le CN justifie cet état de fait par des contraintes financières, mais surtout parce qu’il ne se sent pas tenu de payer seul la totalité des dépenses étant donné que l’utilisation qui est faite du pont est moindre que celle qui était prévue originellement.
Cette situation entraîne comme conséquence que la détérioration du pont ne fait qu’augmenter d’une année à l’autre et, par conséquent, son espérance de vie utile diminue aussi considérablement. Il y a aussi son aspect esthétique qui est déjà entaché depuis quelques années et qui dénote un état de délabrement jugé par beaucoup de gens comme indigne d’un monument d’une si grande valeur.
Une estimation préparée en 1987 par les experts du CN démontre qu’il faudrait consacrer 20 M$ pour refaire une toilette complète au pont ; ce qui signifie un sablage du métal à nu et deux couches de peinture. D’un autre côté, on estime que démanteler le pont si l’on juge que son entretien est trop coûteux coûterait environ 100 M$ et reconstruire un pont identique en coûterait 600 M$ selon les estimations de 19873.
On connaît la suite. Notre vénérable pont se détériore de plus en plus. C’est navrant.
1 : L’Hébreux, Michel (2001) Le Pont de Québec. Québec, Septentrion, page 219.
2 : L’Hébreux, Michel (2001) Le Pont de Québec. Québec, Septentrion, page 220.
3 : L’Hébreux, Michel (2001) Le Pont de Québec. Québec, Septentrion, page 221.